Fabrice Melleray
Professeur de droit public à l’Université Paris I
Art. 147.
1 – Quelle est, selon vous, la définition du droit administratif ?
J’adhère à la définition de Jean-François Lachaume dans le Traité de droit administratif (tome 1, p.115) : « Le droit administratif est une branche du droit public interne, regroupant les règles spécifiques relatives à l’accomplissement par les personnes publiques, ou sous leur contrôle, de missions qu’elles considèrent comme d’intérêt général, et qu’applique le juge administratif ».
2 – Selon vous, existe-t-il un « droit administratif d’hier » et un « droit administratif de demain », et dans l’affirmative, comment les distinguer / les définir ?
Oui. Le droit administratif classique était ouvertement et nettement inégalitaire (Cf. Maxime Le Tourneur, Mélanges Julliot de la Morandière, Dalloz, 1964, p. 277 : « le Droit administratif a pour objet essentiel de déterminer les rapports entre, d’une part, des collectivités publiques, qui, agissant dans un but d’intérêt général, sont, de ce fait, investies de pouvoirs spéciaux, et, d’autre part, des particuliers qui, n’étant mus que par des mobiles d’ordre privé, doivent s’incliner devant des impératifs plus puissants, mais qui, en leur qualité de citoyens, jouissent de droits comportant un minimum incompressible »).
Le droit administratif contemporain est moins inégalitaire et prend davantage en compte les intérêts des administrés, leurs droits publics subjectifs ou leurs droits fondamentaux pour utiliser une terminologie désormais courante. Nous ne sommes plus un « peuple d’administrés », pour l’écrire comme Léon Blum, et la « relation administrative » s’est notablement équilibrée.
3 – Qu’est ce qui fait, selon vous, la singularité du droit administratif français ?
La place du Conseil d’Etat et le champ d’application et l’originalité de ce droit spécial (aux contrats ou en matière de responsabilité par ex.).
4 – Quelle notion (juridique) en serait le principal moteur (pour ne pas dire le critère) ?
Il n’y a selon moi pas de critère du droit administratif (Cf. Rivero, Rdp, 1953). Le moteur principal demeure la notion de service public.
5 – Comment le droit administratif peut-il être mis « à la portée de tout le monde » ?
En rendant obligatoire l’abonnement à l’Ajda.
6 – Le droit administratif est-il condamné à être « globalisé » ?
La « globalisation » est une tendance profonde, puissante et très probablement durable voire irréversible.
7 – Le droit administratif français est–il encore si « prétorien » ?
Oui. Le juge administratif créait hier la matière faute de textes. Il la crée toujours aujourd’hui malgré le foisonnement de textes.
8 – Qui sont (jusqu’à trois propositions) selon vous, les « pères » les plus importants du droit administratif ?
- Edouard Laferrière,
- Maurice Hauriou
- et Marcel Waline.
9 – Quelles sont (jusqu’à trois propositions) selon vous, les décisions juridictionnelles les plus importantes du droit administratif ?
- Terrier
- et Nicolo.
10 – Quelles sont (jusqu’à trois propositions) selon vous les normes (hors jurisprudence) les plus importantes du droit administratif ?
- Le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;
- l’article 20 de la Constitution.
11 – Si le droit administratif était un animal, quel serait-il ?
Un félin.
12 – Si le droit administratif était un livre, quel serait-il ?
Le prince (Machiavel).
13 – Si le droit administratif était une œuvre d’art, quelle serait-elle ?
Le Sacre de Napoléon (David).
Vous pouvez citer cet article comme suit :
Journal du Droit Administratif (JDA), 2017, Dossier 04 : «50 nuances de Droit Administratif» (dir. Touzeil-Divina) ; Art. 147.
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